Accord sur le plan de relance européen

22 juillet 2020

EU | Europe | Commission européenne

Une étape décisive de la construction européenne

Au bout de 4 jours et 4 nuits de négociations intenses (soit deux sommets au lieu d’un), les vingt-sept pays de l’Union européenne sont parvenus à ce qui était jugé presque impossible au vu de la posture des pays dits frugaux menés par les Pays Bas : un accord sur le plan de relance de 750 milliards d’euros.

La nature des compromis et concessions de part et d’autre (et notamment le montant des subventions, ramenées de 500 à 390 milliards d’euros) ne remet pas en cause l’essentiel de l’ambition et de la nouveauté de ce plan, qui intègre pour la première fois un réel mécanisme de solidarité budgétaire, et un financement réalisé au niveau de la Commission européenne. Ce plan renforce donc le poids du budget européen face aux budgets nationaux, et donnera à l’Union européenne une meilleure capacité à répondre à des chocs asymétriques à l’avenir. Surtout, un point essentiel a été préservé : le refus de donner à des États membres un droit de veto, ce qui affirme la dimension communautaire et fédérale du projet européen : les programmes nationaux seront en effet évalués par la Commission européenne, validés à la majorité qualifiée.

Cet accord qui doit encore être voté par le Parlement européen marque donc probablement une étape décisive dans la construction européenne, et s’inscrit dans une histoire communautaire qui a avancé par bonds successifs face aux crises les plus aigües des dernières décennies. C’est face à l’adversité, la nécessité et l’urgence que les dirigeants européens sont ramenés à l’essence du projet européen: l’affirmation d’une communauté de destin dont la pérennité repose sur le renforcement progressif des solidarités de droit et des interdépendances de fait. Face à des puissances régionales dont l’ambition globale s’affirme (Russie, Iran, Chine) et un allié américain dont le rôle s’efface, se mettre d’accord sur ce plan tient presque du réflexe de survie pour le projet européen.

Sur le plan économique, que faut-il attendre de ce plan en termes de retombées et à quelle échéance ? C’est là que les choses se compliquent sans aucun doute. En effet, on peut escompter que les premiers effets de ce plan ne se feront sentir qu’à partir de la mi- année 2021, ce qui n’en fait pas réellement un plan de relance conjoncturelle face à l’ampleur de la récession en 2020, mais davantage un plan d’investissement structurel avec notamment un volet climatique important, et qui vient compléter des mesures conjoncturelles nationales. Cette forme de « new deal » européen vient particulièrement en appui des pays qui sont à la fois plus sévèrement touchés par la pandémie et dont la marge de manœuvre budgétaire est plus limitée comme l’Italie qui percevra plus de 80 milliards d’euros. Deux concessions enfin qui posent question à plus long terme : l’augmentation des rabais dont bénéficient le Danemark, les Pays Bas, l’Autriche et la Suède sur la contribution au budget communautaire, et l’objectif de neutralité carbone en 2050 qui sera apprécié au niveau global et non au niveau de chaque pays.

Les bénéfices de ce plan sont peut-être au final à rechercher dans la perception du risque de la zone euro. Dans la lignée du « Whatever it takes » de Mario Draghi en 2012, qui posait en hypothèse incontestable la solidarité monétaire et financière de la zone euro, cette affirmation de la solidarité budgétaire européenne réduit le risque de divergence au sein de la zone euro et améliore la perception de soutenabilité des dettes publiques, et c’est là sans doute le plus important. C’est le signal que renvoient les marchés mardi matin, avec une détente sur les obligations italiennes (dont le spread a été divisé par deux depuis fin avril) et une forte progression des valeurs bancaires.

 

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22 juillet 2020

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